PLAN
- Définition
- Champ de l’obligation de discrétion et de secret professionnel
- Conséquence de la violation de l’obligation
1. Définition
L’article L2315-3 du Code du travail prévoit que l’ensemble des membres du Comité Social et Economique est tenu à une obligation de discrétion à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par l’employeur. Les membres du CSE sont également tenus au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication.
Ces obligations visent à protéger l’entreprise contre toute fuite d’informations stratégiques.
Cela signifie que les informations couvertes par les obligations de secret et de discrétion ne doivent pas être divulguées aux personnes extérieures au CSE (salariés et tiers à l’entreprise).
L’employeur a donc le droit, quand il révèle certaines informations CSE, de demander à ses membres de ne pas les révéler en dehors du comité. Pour cela il doit le faire au plus tard lors de la réunion du CSE.
Sont également concernés par ces obligations :
- Les différents experts auxquels le CSE peut recourir : expert-comptable, expert technique, expert libre et expert santé/sécurité ;
- Les experts et les techniciens que l’employeur peut adjoindre aux différentes commissions du CSE ;
- Les collaborateurs chargés d’assister l’employeur dans le cadre des réunions de la Commission Santé, Sécurité et Conditions de Travail (CSSCT) ;
- Les membres du CSE central, du comité de groupe, du comité d’entreprise européen et du comité de la société européenne ;
- Les représentants du CSE au conseil d’administration ou de surveillance de la société .
Cette obligation de discrétion ne peut jouer que si l’information présente un caractère confidentiel et est donnée comme telle par l’employeur.
2. Champ de l’obligation de discrétion et de secret professionnel
A. L’obligation de discrétion
Pour qu’on puisse interdire au CSE de diffuser une information, celle-ci doit présenter un caractère objectivement confidentiel. C’est le cas lorsqu’elle n’est pas déjà connue du public ou du personnel ou que sa divulgation pourrait nuire aux intérêts de l’entreprise.
Il peut s’agir des orientations stratégiques, d’études de marché, de projets de nouveaux produits, d’une réponse à un appel d’offres, par exemples. En revanche, un projet de licenciement économique, de réorganisation ou d’externalisation pourrait difficilement être considéré comme confidentiel.
S’agissant de l’obligation de discrétion à l’égard des informations contenues dans la Base de Données Economiques et Sociales (BDES), l’employeur doit indiquer de quelles informations il s’agit ainsi que la durée du caractère confidentiel. Il convient ainsi de veiller à ce que la direction ne cherche pas à tout rendre confidentiel, ce qui empêcherait les élus d’informer les salariés.
- Une information est confidentielle si sa divulgation est de nature à nuire à l’intérêt de l’entreprise. Ce n’est donc pas le cas d’une information déjà largement connue du public ou des salariés. La jurisprudence a pu retenir que l’employeur qui classe confidentiels tous les documents remis sur un projet sans en justifier la nécessité, porte une atteinte illicite aux prérogatives du comité .
Il appartient à l’employeur d’indiquer expressément aux membres du CSE que l’information est confidentielle. L’obligation de discrétion n’a en effet rien d’automatique. Il faut une déclaration expresse de la part de l’employeur au moment de la remise des documents ou de la présentation du projet. Cette déclaration doit être actée au procès-verbal de réunion .
- Si rien dans le procès-verbal n’indique que telle ou telle information avait un caractère confidentiel, l’employeur ne pourra pas reprocher à un membre du CSE de l’avoir divulguée dans l’entreprise .
De plus, l’employeur ne peut pas interdire aux membres du CSE de prendre des notes sous prétexte que les informations délivrées sont confidentielles. A ce titre, il est important d’avoir une trace écrite de tout ce qui s’est dit en réunion. Il se peut donc, lorsque le secrétaire du CSE estime que cela en vaut la peine, de faire deux procès-verbaux : un « PV light », sans les informations confidentielles et qui sera diffusé, et un PV complet qui sera conservé dans les archives du CSE.
Attention : Il n’est pas possible d’interdire aux élus du CSE de quitter la salle de réunion avec les documents estampillés « confidentiel », car ils peuvent en avoir besoin afin de les étudier, et leur interdire reviendrait à les empêcher d’exercer leur mandat. Ils sont tenus par une obligation de discrétion et cela est suffisant.
Vigilance cependant, certaines informations sont automatiquement considérées confidentielles par la loi. Pour ces informations, l’employeur n’est donc pas obligé de le rappeler au CSE et, surtout, de justifier sa position. C’est le cas pour :
- Les documents de gestion prévisionnelle que certaines sociétés sont tenues d’établir et de mettre à la disposition du CSE dans la BDES ;
- Les informations communiquées au CSE ou à la commission économique dans le cadre d’un droit d’alerte économique ;
- Les informations communiquées au CSE dans le cadre de la recherche d’un repreneur en cas de fermeture d’un établissement .
Toutefois, l’employeur qui abuserait de cette prérogative peut être poursuivi pour délit d’entrave au fonctionnement du CSE. En effet, la mission du comité étant d’informer le personnel de l’entreprise, y mettre des obstacles pour des raisons trompeuses revient à entraver le fonctionnement du comité.
- Lorsqu’elle est invoquée, la confidentialité empêche les élus d’informer les salariés. Ce type de situation doit donc rester exceptionnel.
L’invocation abusive de la confidentialité par l’employeur, dans le cadre d’une information / consultation, en ce qu’elle porte une atteinte illicite aux prérogatives des élus, peut être réparée par la reprise de la procédure d’information/ consultation à son début.
B. L’obligation de secret professionnel
En application de l’article L2315-3 alinéa 1 du Code du travail, les membres du CSE sont tenus au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication. Il a été jugé que constituaient de tels procédés ceux qui présentaient une certaine originalité et un intérêt pratique et commercial pour celui les exploitant, en lui permettant une amélioration de la production et une diminution du prix de revient, et qui étaient restés inconnus de ses concurrents .
L’obligation de secret professionnel est automatique, mais est limitée aux questions relatives aux procédés de fabrication. Cette obligation joue ainsi automatiquement sans que l’employeur ait à la signaler aux élus.
Il convient d’être prudent puisque la violation de cette obligation peut faire l’objet de poursuites pénales pour délit de révélation d’une information à caractère secret . Ce qui peut s’ajouter également à un licenciement pour faute grave, ou même une faute lourde s’il y a eu intention de nuire à l’entreprise.
3. Conséquence de la violation de l’obligation
Il faut avoir en tête que la violation de l’obligation de discrétion peut justifier une sanction disciplinaire contre le représentant du personnel et des poursuites en justice permettant à l’entreprise de demander des dommages intérêts en réparation du préjudice subi. Il convient donc faire preuve de prudence.
La jurisprudence a notamment retenu que si les informations ont été divulguées, l’élu du CSE ne pourra pas faire valoir que c’est en sa qualité de délégué syndical qu’il a diffusé les informations .
De même, la violation du secret des procédés de fabrication peut entraîner des sanctions pénales pour son auteur à plusieurs titres.
L’article L1227-1 du Code du travail prévoit que « le fait pour un directeur ou un salarié de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrication est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros. La juridiction peut aussi prononcer, à titre de peine complémentaire, pour une durée de cinq ans au plus, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille prévue par l’article 131-26 du Code pénal ». Les membres du CSE en tant que salariés encourent donc ces peines d’emprisonnement et d’amende s’ils violent leur obligation de respecter le secret de fabrication.
Par ailleurs, l’article 226-13 du Code pénal sanctionne toute « révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire ». La sanction prévue est d’un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Cet article peut s’appliquer aux membres du CSE, de par leur mandat temporaire et des informations sensibles qui sont portées à leur connaissance dans ce cadre.
Ressource pour approfondir :
- Actuel RH, article « L’obligation de confidentialité des élus, un outil pour accéder à l'information économique » du 10 janvier 2019.