J’ai été licencié… Dois-je signer mon solde de tout compte ?

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Lorsqu'un salarié est licencié, il reçoit un solde de tout compte qui fait l’inventaire des sommes versées à l’occasion de la rupture de son contrat.

S'il est signé, on dit que ce document a un effet « libératoire » pour l’employeur.

Dit plus clairement : si je le signe, je n’aurai plus que 6 mois pour saisir les prud’hommes et contester les sommes qui y sont mentionnés.

Vous pouvez également le signer en apposant la mention « sous réserve de mes droits » sous votre signature. Cette mention neutralisera le délai de 6 mois.


Dans l'affaire jugée le 14 novembre 2024 (Cass. soc., 14 novembre 2024, n° 21-22.540), un salarié licencié n’avait pas signé son solde de tout compte en raison de son incarcération.

Estimant avoir été lésé sur certaines sommes, il avait saisi les prud’hommes à sa sortie de prison, plus de 3 ans plus tard.

La Cour de cassation a estimé que, bien que le salarié n’ait pas signé le solde, le délai de prescription avait couru dès 2013, et son action était désormais forclose, en ce que son incarcération n’avait pas suspendu l’écoulement des délais « normaux » de prescription.

Ainsi, deux enseignements peuvent être tirés de cette affaire :

  • Si vous êtes licencié, votre solde de tout compte non-signé vous permettra d’agir aux prud’hommes en cas de contestation des sommes ou en cas de non-versement par l’employeur ;
  • Si vous êtes incarcéré, vous devrez tout de même agir dans les délais de prescription légaux (un an pour la contestation de la rupture, deux ans pour l’exécution du contrat, trois ans pour le paiement de salaires et cinq ans pour des faits de harcèlement moral ou de discrimination) ; ces délais courront, y compris pendant votre séjour en prison.

Nous ne vous souhaitons bien évidemment ni l’un, ni l’autre…

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Inaptitude au travail : être (reclassé), ou ne pas être (reclassé) ?

Pour rappel, lorsque vous êtes déclaré inapte à votre poste par le médecin du travail, ce dernier doit se prononcer sur la possibilité ou non de procéder à votre reclassement. Si votre reclassement est possible, alors l’employeur est obligé de vous rechercher un poste disponible. Ce n’est qu’à défaut de poste proposé qu’une procédure de licenciement sera enclenchée à votre encontre.

Vous pourrez alors saisir les prud'hommes si vous estimez que l’employeur a manqué à cette obligation de reclassement.

Mais alors, si vous en arrivez là, qui devra prouver quoi ?

Dès lors que l’employeur propose un poste respectant les recommandations du médecin du travail, il est présumé avoir rempli son obligation de reclassement. Il appartient alors au salarié de « renverser » cette présomption en apportant la preuve contraire.

Dans une affaire jugée par la Cour de cassation le 4 septembre, (Cass. Soc. 4 septembre 2024, n°22-24.005), un salarié licencié pour inaptitude avait estimé que son employeur n’avait pas loyalement recherché un poste dans sa région.

La Cour d’appel avait alors donné raison au salarié, en estimant que l’employeur n’apportait pas la preuve d’avoir recherché un tel poste.

Cependant, la Cour de cassation a censuré cette décision, estimant que c’est bien au salarié d’apporter des preuves de la déloyauté de l'employeur dans ses recherches.

En pratique, archiver des offres d’emplois diffusées par votre employeur sur LinkedIn, Indeed ou en interne pourra vous permettre de monter votre dossier. Avis aux « screenshoters » en tout genre.

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Victimes de racisme : les juges vous entendent !

Il n'est pas rare que des salariés discriminés se désolent du caractère indémontrable des agissements qu'ils subissent. Et pour cause : la discrimination – et plus encore, la discrimination en raison de l’origine – sévit dans l'opacité.

L'article L. 1134-1 du Code du travail vient à la rescousse de ces salariés en disposant que devant un juge, ces derniers n'ont qu'à présenter des éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination – et non des faits démontrant intégralement la discrimination. Pour se défendre de ces agissements, l’employeur devra prouver que les éléments reposent sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Dans une affaire récente, un salarié avait dénoncé à son employeur des propos racistes répétés de ses supérieurs, une attitude discriminatoire, et, notamment le refus de l’un d’eux de le saluer.

Estimant ces agissements discriminatoires, il avait pris acte de la rupture de son contrat et saisi les prud’hommes pour faire reconnaître par les juges cette démission comme un licenciement nul – avec toutes les conséquences indemnitaires qui s’ensuivent

La Cour d’appel avait jugé que le salarié n’avait pas démontré avoir subi de mesure discriminatoire.

La Cour de cassation a sorti son stylo rouge et a censuré cette décision (Cass. soc., 14 nov. 2024, n° 23-17.917), jugeant que les faits rapportés étaient autant d'indices laissant supposer l'existence d'une discrimination liée à son origine.

Cet arrêt a le mérite de rappeler aux salariés qu'en matière de discrimination, la charge de la preuve ne repose pas entièrement sur eux !

Droit disciplinaire
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Macho macho man

En Droit, l’employeur est tenu de protéger les salariés des agissements sexistes et des faits harcèlement sexuel.

Mais un « gros lourd » n'est pas « licenciable » en toute circonstance !

Dans une autre affaire récente, un cadre dirigeant avait été licencié pour faute grave après des échanges privés envoyés de sa messagerie professionnelle (cass. soc., 25 septembre 2024, n°23-11.860). Ces messages contenaient des blagues lourdes à base de commentaires humoristiques photos pornographiques, dont il ne sera pas fait mention ici – mais dont il sera simplement indiqué qu’une d’entre elle consistait à assimiler un pénis et un frein à main.

Bref… la lourdeur est manifeste… mais la Cour de cassation a tout de même jugé ce licenciement nul, pour atteinte la vie privée du salarié.

Elle considère donc que le secret des correspondances s’appliquait, y compris concernant des échanges intervenus par le biais d'outils professionnels.

Pour les juges, l'employeur a donc fauté en ce qu’il a licencié le salarié en raison de l'usage qu'il avait fait de sa liberté d'expression.

La sévère sanction prononcée par la Cour d’appel a donc été confirmée : 210.000 euros nets de dommages et intérêts pour licenciement nul + 68.197,56 euros nets d’indemnité de licenciement – après tout, l’argent n’a pas d’odeur.

Si sur le plan éthique, la décision interroge, sur le plan strictement juridique, elle doit être saluée!